Dès ses débuts, Vincent Dieutre a adopté la forme du journal intime en tant que terrain d’expression filmique privilégié, pour faire de son corps et de son esprit les instruments d’une expérience de la vie. Dans «Leçons de ténèbres», dont le titre est tiré d’une œuvre du musicien François Couperin, il erre d’une ville à l’autre – Utrecht, Naples, Rome – en cherchant la beauté et la sensualité dans les gestes des hommes et des artistes. Sa voix, profonde et tressée de tristesse, accompagne les images ainsi que les personnages qui s’approchent de son monde, où réalité et imaginaire, logique de la raison et incandescence des sens, immanence et transcendance se déploient. Passé et présent se croisent dans ce récit filmique, qui mélange les formats (Super 8, 35 mm, vidéo) ainsi que les lieux traversés, et passe du profane au sacré. Le résultat est un sentiment de vertige, similaire à celui éprouvé face aux tableaux du Caravage, à ses corps exténués illuminés par la passion d’un instant et déjà entourés par les ténèbres.
Luciano Barisone, Directeur de Visions du Réel