Dans un village corse légèrement futuriste (la science-fiction rurale, première belle idée), Jessica recueille des orphelins – uniquement de jeunes hommes, en cavale, coupables d’on ne sait quel crime (leur jeunesse ?) traqués par une police exterminatrice. Avec leur grande sœur de substitution (interprétée par la troublante Aomi Muyock), ils forment une confrérie aimante et douce, hédoniste et égalitaire, mais armée jusqu’aux dents. Projetés dans cette bulle spatio-temporelle qui ne demande qu’à être percée, le très jeune couple de cinéastes Caroline Poggi et Jonathan Vinel déploie ici son univers unique, tout à la fois nébuleux et très concret. Peu de films français récents ont été aussi en prise avec leur époque ou, du moins, une certaine vision de l’époque où le fantasme et la fiction auraient achevé d’envahir le réel, tout en le figeant. Il n’y a là, dans ce futur qui accouche d’un nouveau Moyen Âge, plus que mythes, contes et rites magiques. Mais tous sont ancrés dans une forme de banalité. Il faut l’adresse de ces bardes milléniaux pour transcender la banalité, faire crépiter la moindre lumière, filmer chaque baiser comme si c’était le dernier. – Jacky Goldberg