Pari

Siamak Etemadi, 2020, Grèce/France/Pays-Bas/Bulgarie/Suisse, DCP, version originale multilingue sous-titrée français, 101', 16/16 ans

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Description

«Les Iraniens à l’étranger» pourrait facilement devenir un sous-genre cinématographique, avec les nombreuses sources de conflits potentiels que cela emporte. Ces situations tendues sont partout dans «Pari», le premier long-métrage de l'Iranien vivant à Athènes Siamak Etemadi, qui a fait sa première mondiale dans la section Panorama du 70e Festival de Berlin.

«Hélas, nos jeunes gens ont tendance à se perdre ici, à cause de toutes les libertés – les soi-disant libertés», s'entendent dire Farrokh et sa femme, Pari, au Consulat iranien d’Athènes. Le couple est en ville pour rendre visite à leur fils Babak, venu deux ans plus tôt grâce à une bourse pour l’Université polytechnique. À présent, il a disparu sans laisser de traces: il n’est pas venu les chercher à l’aéroport et il n'a pas mis un pied dans son appartement depuis trois mois (il n'a pas payé son loyer non plus, d'ailleurs). Quant à la bourse, cela fait un an qu'elle est arrivée à son terme.

Farrokh fulmine. Le voilà, dans un pays «oublié de Dieu», sans langage commun pour communiquer, regrettant amèrement d’avoir laissé sa femme le convaincre de laisser Babak partir. «Tu as rempli sa tête de contes de fées», lui reproche-t-il. Disgrâce, humiliation, déshonneur: Farrokh ressent tout cela, comme si on lui mettait le nez dedans.

Pari, quoiqu'elle soit très préoccupée, reste convaincue qu’il doit y avoir une raison à la disparition de Babak. Le couple prend une chambre d’hôtel et entame des recherches. Le consulat leur conseille d'enquêter auprès des églises chrétiennes, où certains musulmans se convertissent pour obtenir l’asile. Là-bas, une femme iranienne, tête nue, souriante, propose son aide à Farrokh et Pari. Farrokh a l’air effaré. De toute façon, personne ne connaît Babak en ce lieu.

«Pari» parle avant tout du personnage éponyme, de son histoire et du parcours qui l'attend. Petit à petit, l’histoire dévoile une nouvelle facette de cette femme complexe, qui mérite bien d’être connue. Sa maîtrise de l’anglais (qui fâche naturellement son mari) va leur servir dans leur quête, notamment pour comprendre des notes gribouillées à la hâte que Pari a recueillies dans l’appartement abandonné de Babak. Le mot «A», entouré d'un trait, l'amène dans le quartier athénien d'Exarcheia, où d’autres problèmes vont survenir: Pari se retrouve même dans une émeute contrôlée par la police où son voile, son chador, prend feu et doit être sacrifié.

En effet, plusieurs sacrifices vont être nécessaires pendant la quête de Pari, un chemin que parcourent des hérétiques, des anarchistes, des prostituées, et peut-être même un ange gardien démoniaque qui prend la forme d’un Alsacien à l'allure de loup. Le réalisateur et scénariste du film insiste parfois assez lourdement, mais cela finit toujours par payer. À elle seule, la performance impeccable de Melika Foroutan mérite le détour. Les citations récurrentes de textes du poète soufi Rumi évoquent non seulement l'idée de renaissance, mais aussi les rêves et choix de Babak comme de sa mère. – Jan Lumholdt, Cineuropa

Images © Bord Cadre Films